Samedi 18h (oui oui, juste après avoir vu Dieu… Euh, Damon), j’abandonne lâchement Yasmina et son ami pour rentrer à Hammersmith. Je flippe un peu, parce que ce coup-ci, il n’y aura personne pour me seconder si je ne trouve pas le Hammersmith Palais, si je ne comprends pas ce qu’on me raconte, si je n’arrive pas à récupérer mes billets réservés sur internet, si, si…
Je vous remets dans le contexte : le Hammersmith Palais est une des plus anciennes salles de spectacle de Londres, qui a inspiré aux Clash une chanson célébrissime. Or, il doit être détruit le 1er avril… Pour faire place à des bureaux sans poésie ni histoire, tout à fait en accord avec la modernisation et la banalisation qui ravage ce quartier. Je vais donc assister à l’une des dernières représentations qui aura lieu dans cette salle mythique, en présence du non moins légendaire Paul Simonon (est-il nécessaire de vous rappeler qui il est?).C’est plus qu’un concert. C’est un pélerinage en Terre Sainte!
De l’extérieur, cela n’a rien d’exceptionnel. Juste une file d’une dizaine de personnes, dont quelques Italiens qui gesticulent et font profiter tout le quartier de leur conversation téléphonique, et des vigiles. Je me renseigne sur le moyen de récupérer mes billets, même file pour tout le monde. Cela m’étonne un peu, mais je suis sage et disciplinée (manquerait plus que je me fasse jeter). Il y a des journalistes qui nous demandent si on est au courant de ce qui arrive au Hammersmith Palais… Moi oui, mais je n’ose pas trop l’ouvrir ^^’
Coup de bol, quelques personnes après moi, le vigile demande aux suivants d’aller attendre à une autre entrée… Je fais donc partie des 1ers ! Cela, au bout d’un peu plus longtemps que prévu d’attente debout (et j’ai pas mal marché dans la journée), mais cela me permet, après récupération de mon billet, de foncer sans croire à ma chance aux 1ères loges, juste devant la scène.
Si l’ouverture des portes a été retardée, le début du concert se fait encore plus attendre. Mes pieds me font souffrir, je meurs de soif (ma bouteille a été confisquée à l’entrée), il y a des fauteuils et un bar qui me tentent terriblement, mais je refuse de céder ma précieuse place… Coup de chance numéro 2 : une fille juste à côté de moi est suppliée par une dame de céder sa place à son mari en fauteuil roulant. Tout cela pour qu’il finisse par être replacé ailleurs par la sécurité… Je me dis qu’à sa place, je me serais également sentie obligée d’accepter et m’agrippe d’autant plus fermement à ma barrière que je n’étais pas bien loin de devoir l’abandonner.
Ma déshydratation aggravée par le tabagisme passif que je subis, je commence à penser que je serais pas fâchée que ça commence… Mais The Good, the Bad & the Queen, ça se mérite. Entretemps, j’aurai au moins eu tout le loisir d’admirer la salle et de regretter qu’on la détruise, et de m’imprégner de l’ambiance des tentures au plafond, de la toile tendue derrière la scène, baignée dans une lumière violette qui teinte la fumée qui l’envahit… C’est quasi mystique.
Le concert débute avec l’orchestre de Tony Allen, papa de l’afro-beat. Et il fallait bien ça pour comprendre le « Tony Allen got me dancing »! Si je n’étais pas coincée entre 2 enragées italiennes et une espagnole bourrée qui ne tiendrait pas debout si elle ne s’appuyait pas sur mon dos, je me trémousserais furieusement!
Je me doute que mes chouchous ne vont pas arriver de suite, ayant aperçu au dessus de la tête de la bonne femme qui m’a donné mon billet l’ordre de passage des invités (ainsi que les prévisions horaires du spectacle… Qui n’est pas censé se terminer avant minuit, heure du dernier métro. Arg.), ce qui, du coup, m’empêche complètement de comprendre ce qu’elle m’a raconté, bref.
C’est donc au tour de John Cooper Clarke. Un poète anglais apparemment, look Mick Jagger croisé avec Nicolas Sirkis, monté sur 2 allumettes d’une longueur spécialement étudiée pour ne pas vous cramer les doigts quand vous allumez votre cheminée. Pour le peu que je m’y connais, ça ressemble à du slam, émaillé de blagues, et débité à un rythme d’enfer… Pas facile à suivre pour une étrangère. Ca n’a pas raté, j’ai fini par décrocher, et commencé, honnêtement, à trouver le temps long…
Arrive ensuite Don Letts qui nous passe une version reggae de Eleanor Rigby…
Pendant tout le show, il a filmé juste devant moi.
Lorsqu’il nous passe enfin « White man in Hammersmith Palais », j’ai chanté à tue tête. Dommage que mes chouchous ne nous en aient pas joué une version toute personnelle qui aurait été tout à fait fabuleuse (Paul Simonon a oublié les accords! ^^), mais c’était trop bon quand même… Exactement ce qu’il fallait pour me préparer psychologiquement à l’atteinte du nirvana musical qui allait suivre…
Oh-mon-Dieu… J’ai oublié toute lassitude pour sentir la musique vibrer dans mon estomac, je me suis abandonnée à la voix de Damon, à l’alchimie des instruments, et je vous jure que le temps de Behind the Sun, j’ai touché le 7ème ciel… Et puis, surprise, plus tard, en réécoutant la chanson, je me suis rendu compte que tout au long, on entendait ces sirènes obsédantes qui constituent le fond sonore des nuits londoniennes…
Vous me direz qu’en achetant le CD, vous pouvez vivre les mêmes émotions sans vous ruiner la santé (et le portefeuille) à Londres.
Mais vous n’auriez pas Simon Tong à quelques mètres de vous, vous ne verriez pas Paul Simonon manier sa guitare comme une mitraillette, l’évidente complicité entre les membres du groupe, tant de personnes dans une même pièce qui aiment la même musique que vous et chantent en choeur comme un seul homme (jusqu’ici, ce que j’avais eu de mieux en matière de communion musicale, c’était une personne qui savait vaguement de qui je parlais) et Damon qui joue avec nous, public dévôt…
Oh mon Dieu… Oh mon Dieuuu! « Oh mon Dieu » est à peu près tout ce que je n’ai pas cessé de me répéter tout le concert.
Jusqu’à ce que Paul Simonon emporte un petit souvenir à sa façon.
J’aurais peut-être du emporter ma barrière… 😉
Puis les membres du groupe sont partis… Encore sonnée par ce que je venais de vivre, j’ai galéré un peu pour trouver la sortie, pas franchement ravie de quitter la fête qui continuait, mais j’étais toute seule… Bien que si j’avais continué à sympathiser avec la fille de la file d’attente pour les toilettes, qui sait… Je me rappellerai toute ma vie, je crois :
– Sorry, I can’t understand what you say… It’s noisy there, and I’m french… (« I’m french ». L’excuse universellement acceptée pour signifier que tu
comprends rien).
– France??? Oh, it’s lovely!!!
(ah bon ??? AH AH !!! Tu entends, le chauve ? XP)
Là, elle m’a raconté Dieu seul sait quoi sur son père qui avait travaillé à Toulouse… Déjà que je suis sourde, comme j’ai pas pris l’option « drunken english », j’ai rien capté.
Je suis donc rentrée avec mon odeur de cigarette et des souvenirs plein la tête, en pensant que jamais plus je ne revivrais quelque chose d’aussi génial… Jusqu’au prochain concert de The Good, The Bad and The Queen.
2 commentaires
Tip top moumoute la photo où on te voit dis donc… dommage qu’on voit pas Damon 🙁
Pis nouille comme je suis je n’avais po compris que tu allais voir The Good The Bad And The Queen en fait… mais ça m’a carrément donné envie… (raaaaah faut que je trouve les sous et surtout qu’ils confirment la Route du Rock cet été euuuh)
[…] d’excellents éclairages sur London Calling et Rock the Casbah. Je vous ai déjà parlé de White man in Hammersmith Palais. En voici les paroles […]