Taisen Deshimaru est né en 1914 au Japon, dans une famille nombreuse et aimante. Son père veut faire de lui un homme d’affaires, son grand-père lui inculque les bases des arts martiaux, et sa mère lui transmet un sens fort de la religion.
Sa carrière ne lui permet pas de réaliser son rêve américain et son épreuve du zen Rinzai le dégoûte rapidement de cette école. Il trouve son épanouissement dans le zen sōtō auquel il s’initie auprès de Kōdō Sawaki. Devenu moine dans les années 60, il débarque en France et entreprend dès lors de faire connaître le zen en Europe. C’est lors d’une retraite dans les années 70 à Val d’Isère que Philippe Coupey recueille ses enseignements transmis au public dans Les deux versants du zen.
L’ouvrage est une réédition améliorée d’annexes, de notes de bas de page, et surtout d’un précieux glossaire qui paraîtront d’autant plus nécessaire que cette lecture n’est pas d’un abord facile. Pour ma part, n’ayant que des connaissances très superficielles à la fois du bouddhisme et du zen, j’ai fait de nombreux allers-retours entre ma page en cours et les définitions de termes en japonais dans le texte (j’aurais, d’ailleurs, apprécié de trouver des notes de bas de page au moins à leur première apparition).
Dans le bouddhisme, ce sont les sic pāramitā (vertus, NDLR) qui sont les plus importantes. La première est fuse, le don sans motif. La deuxième est la moralité, l’harmonie. La troisième est la patience. La quatrième pāramitā est shojin, l’effort. La cinquième est samādhi (état de méditation et de disponibilité de la conscience pendant zazen, NDLR) et la sixième la sagesse. »
Taisen Deshimaru s’étend longuement sur les nuances entre deux des principales écoles du zen, le zen sōtō, introduite au Japon en 1227 par le Maître Dōgen dont il est régulièrement question au cours du livre, et le zen Rinzai, du nom du fondateur de son école, qui est lui aussi cité à de nombreuses reprises. On retiendra notamment son usage régulier du cri « kwat ! » et du bâton pour imprégner ses disciples de ses leçons.
Si l’enseignement de Taisen Deshimaru est à replacer dans le contexte des années 70, avec ce que cela implique comme propos qui nous paraissent aujourd’hui un peu déplacés (notamment lorsqu’il évoque le féminisme), on trouvera dans sa critique de l’Occident moderne des observations encore d’actualité. Il revient fréquemment à l’excès de désirs, à un individualisme croissant, et une perte de rigueur dans l’éducation, que ce soit chez les parents ou toute autre forme d’enseignement.
S’il défend fermement la discipline et ne s’interdit pas de frapper ses disciples pour mieux les imprégner de ses leçons, il condamne néanmoins l’excès de violence dans d’autres écoles et prêche par-dessus tout l’importance de l’attention à la posture.
La forme influence l’esprit. Si la forme est juste, l’esprit est juste.
La préface de l’ouvrage parle ainsi de « sagesse par le corps, actualisée d’instant en instant », et l’expression m’a beaucoup parlé. Taisen Deshimaru oppose la philosophie et les religions occidentales dans lesquelles le corps et l’esprit sont vus comme devant être séparés à tout prix, souvent aux dépens du corps.
Zazen n’est pas l’ascétisme, mais la porte du dharma, l’enseignement de la paix et de la joie. Si vous voulez acquérir des pouvoirs magiques, l’ascétisme est nécessaire. Dans l’hindouisme, dans le bouddhisme tibétain, dans le yoga traditionnel, les adeptes de ces religions recherchent des pouvoirs magiques.
Je recommanderais cet ouvrage à des lecteurs déjà familiarisés un minimum avec le concept du zen et son vocabulaire, ainsi qu’à tous ceux qui voudraient revenir aux sources de la méditation avant que les diverses applications à la mode et livres de développement personnel en fassent une tendance et un outil au service de notre culte de la performance.
Merci aux Éditions de l’éveil qui m’ont fait parvenir ce livre pour lecture et avis !
1 commentaire
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