Pour bien commencer l’année sur ce blog, je vous invite à accueillir chaleureusement un invité de marque : Charles. Vous le connaissez déjà en tant que compagnon de certains de mes voyages ou conspirant impitoyablement à mon humiliation publique. Aujourd’hui, c’est pour qu’il nous donne son avis sur le manga Planètes (ou ΠΛΑΝΗΤΕΣ, transcription du grec ancien qui signifie “vagabond”, à l’origine du mot français “planète”), écrit par Makoto Yukimura, que je lui laisse la parole sur Stendhal Syndrome.
J’ai reçu cette intégrale pour mon anniversaire et dès la couverture, j’ai su que le sujet m’intéresserait.
L’histoire se situe à une époque où le voyage spatial est devenu la norme et il existe même des astronautes chargés d’évacuer des débris en orbite autour de la terre pour ne pas qu’ils entrent en collision avec une station, un satellite ou encore un vaisseau. Des éboueurs de l’espace : le sujet parfait !
Makato Yukimura a écrit ces 4 Tomes (à l’âge de 23 ans, jeune le bougre) entre 2000 et 2004, décrivant la vie de personnages standards dans une station spatiale chargés de nettoyer l’espace en 2075, période où l’exploration spatiale bat son plein. Mais ce n’est pas que de la SF basique, plutôt de la Hard SF réaliste et bien documentée, il n’y rien d’extravagant, hormis peut-être le nombre de personnes présentes sur les stations (mais je chipote).
A tour de rôle on s’arrête sur la vie, les questionnements, les craintes et les aspirations des personnages de manière juste. Il y a peut-être quelques passages un peu attendus dans un manga, le discours sur la persévérance par exemple, mais la plupart des récits sont assez simples sur des situations compréhensibles et on s’identifie très facilement aux héros.
Le traitement des personnage est intéressant car évolutif, le personnage principal par exemple, Hachimaki évolue diamétralement durant ces 4 tomes, d’un petit con, il va devenir un gros con*, puis grandir, mûrir, apprendre etc…
Et tous les personnages importants ont des évolutions similaires, on sent réellement que l’auteur, assez jeune au moment de l’écriture devait se poser beaucoup de questions. Si on était cynique on pourrait trouver cela juvénile : ses raisonnements sur les relations, la difficulté de grandir ou de comprendre ou d’accepter les autres, pourtant on ne sent pas de jugement pour ces personnages, il n’y a pas de grand méchant dans Planètes.
Ce n’est pas le genre d’histoires où il y a besoin d’un élu, d’une prophétie, ou d’une catastrophe à éviter, ce sont juste des personnages qui ont des idéaux différents qui viennent parfois à se confronter ou s’accepter. Pourtant Makato Yukimura n’est pas naïf non plus, la société dépeinte dans ces histoires est forcément inégalitaire, certains pays en payent le prix, il y a des extrémistes qui veulent stopper la colonisation spatiale avec des actes terroristes, une interdiction de fumer aussi (running-gag très rigolo pour l’un des personnages secondaires).
Il y a quelque chose de prenant dans cette histoire, c’est que tout le manga se déroule au moment où l’exploration spatiale explose (quelquefois littéralement), avec des stations sur la lune pour extraire des matériaux rares qui alimentent la Terre, les principales ressources étant épuisées, l’espace est devenu un espoir pour pouvoir s’étendre. Donc c’est encore une époque où une sorte de conquête de l’ouest débute, on ne parle pas encore de colonisation, mais par exemple une grande part du manga fait place à la préparation d’une expédition scientifique vers Jupiter et Hachimaki essaie d’en faire partie.
Toute l’histoire parle de recherche de but, de quête de l’humain vers un endroit auquel il ne peut normalement pas prétendre, l’espace. Pour un humain c’est dur, il y a des conséquences, parfois mortelles mais pourtant on continue, on trouve un moyen de s’adapter et on continue d’avancer, l’auteur arrive avec brio à nous faire partager sa soif d’exploration dans le digne prolongement d’un auteur du XXe siècle. C’est une sorte de seconde révolution industrielle, qui forcément fascine autant qu’elle peut inquiéter.
Une des choses que j’aime dans cette histoire, c’est que le récit arrive toujours à se raccrocher avec des préoccupations auxquelles on peut s’identifier et on arrive même à comprendre les motivations des personnages plus détestables.
Et puis cette idée d’exploration spatiale, c’est quelque chose qui m’a toujours fasciné, c’est finalement un sujet peu traité que la mise en place de l’exploration spatiale. Alors bien entendu on aura toujours des gens pour nous dire qu’on devrait s’occuper de notre planète et que l’exploration spatiale ne sera jamais possible à l’image du mauvais spectacle d’Alexandre Astier (j’t’en foutrais moi de la guitare !)** mais moi je m’en fiche.
Il y a des moments de pure poésie, de l’humour, des sentiments, des questionnements et une envie de voyages, ce n’est pas un métier simple d’être éboueur de l’espace, mais une chose est sûre si on aime rêver d’exploration c’est un récit fait pour vous !
PS : un de mes critères de qualité pour un manga : quand il y a plein de petites descriptions avec des astérisques. Et là c’est le cas ! ***
A noter également : je vous recommande chaleureusement cette intégrale mais pas forcément l’anime dont les personnages ne correspondent pas vraiment à ceux du manga.
Notes de la blogueuse
* Sic.
** Permettez-moi de me désolidariser de cette opinion, moi, j’ai bien aimé L’exoconférence.
*** Un peu comme cet article.
2 commentaires
Je suis tombé sur ce site grâce à un commentaire chez Peccadille et ça me semble bien prometteur (hop dans mes RSS).
Planètes a bénéficié d’une bon* animé à mes yeux mais je n’ai pas eut la chance de lire la version papier alors je ne peux comparer. Dans le même style, plus comique ceci-dit, il y a « Space Brother » qui suit les aventures de deux frères voulant devenir astronautes.
L’aspect SF plutôt réaliste est très intéressant et je note que de plus en plus de films semblent oser s’intéresser à cette aspect ou porter des livres de ce style (Gravity, Seul sur Mars…).
*/pas fan de la guitare non plus mais la première partie du spectacle est sympathique et a au moins la qualité d’essayer de briser quelques idées reçues sur le thème, même si son premier spectacle était beeeeeaucoup plus à mon goût.
[…] arrivé pour Tous nos contretemps, dont l’intrigue criait “Je suis un livre pour Charles […]